Février 2019: B., arrivé au Caricole, directement depuis l’aéroport, en octobre 2018, il est resté 3 mois dans le centre.
Il témoigne de l’inaction du service social, « les gens, ici, ils font 4-5 ou 6 mois et rien ne change », « si tu veux voir la directrice pour
quelque chose, tu dois l’écrire et elle accepte ou pas… ».
A l’intérieur aucune solidarité, ni humanité n’est permise par les agents :
« on a amené un aveugle, c’est les habitants du centre qui l’aidaient à se déplacer, à manger, après, on lui a pas laissé le temps de prendre un avocat, ils l’ont renvoyé »…
“On a entendu le Monsieur crier : aidez-moi », « les agents nous ont empêché de l’aider et 5 hommes ont pris ce Monsieur… »
Il souligne aussi l’incompréhension des décisions par les détenus, « après on te prolonge, tu vas rester encore au centre », ou on te renvoie
« avec la police fédérale et personne ne sait ce qu’il se passe de ceux qui sont renvoyés… »
« il y avait une femme, de l’E., elle a été renvoyée et on a appris qu’elle a été arrêtée à son retour … »… « alors tu stresses et ça fait
des problèmes »…
« Nous rentrons avec une mauvaise image de la Belgique, parce que moi quand j’ai choisi de venir en Belgique, je pensais qu’elle allait
vraiment me protéger et me mettre à l’abri… »,
” ici c’est pire qu’une prison, c’est pas normal ».
Mars 2019: Salut, je suis un jeune Africain qui fait ce témoignage pour essayer d’expliquer ce qu’on vit dans les centres fermés, précisément en Belgique. Je préfère être anonyme pour plus de sécurité. Ce témoignage est aussi un appel à l’endroit de tous ceux qui ont un coeur et qui veulent nous aider, nous qui sommes enfermés juste parce qu’on voulait demander l’asile ou la protection.
Depuis plus de 70 jours enfermé, privé de liberté.
Triste de savoir qu’on fait semblant de nous aider, pourtant ce n’est pas le cas. Je m’explique. Tout est planifié. On nous donne des avocats dont on ne sait pas si oui ou non ils veulent nous aider. Ceux parmi nous qui ont les moyens de prendre les avocats privés ont plus de chance. Nous qui n’avons pas les moyens, c’est difficile.
Triste de savoir qu’en deux mois, il n’y a que deux Africains qui ont eu positif (c’est-à-dire obtenu le statut de réfugié), et quelques libérations. Sur une échelle de 100%, juste 20% ont la libération, le reste sont refoulés.
Une fille ayant passé sept mois ici a été refoulée et à son retour elle a été emprisonnée. Certains sont exilés dans d’autres pays africains.
Je n’ai jamais commis de crime mais je suis menotté au tribunal comme un criminel juste parce que je demande qu’on me libère pour continuer ma procédure. Menotté, enfermé dans une cellule.
Nous sommes six dans notre chambre, nous ne parlons pas la même langue. Il y a des heures pour se raser, se coiffer, manger et aller au milieu de la cour, toujours avec des surveillants pour nous surveiller, pour ne pas qu’on fuie.
Pourquoi fuir, on a fui chez nous pour venir chercher de l’aide et on refuse de nous aider. Je crois que si on nous aidait réellement, personne n’aurait envie de fuir.
Moi, à mon arrivée à l’aéroport, le policier qui m’a interpellé a juré de me faire retourner de là où je suis.
L’Office des étrangers fait tout pour nous faire retourner chez nous. Je n’ai plus de toit chez moi, je n’ai plus mes parents en vie, mais ils veulent me faire retourner. Pourtant ma vie est menacée. Je demande une seule chose, de l’aide, la protection.
Il y en a des choses qui se passent dans les centres. Beaucoup d’injustice, je vous jure. La seule chose qui est respectée c’est les droits de l’homme pour masquer leurs injustices.
Parce qu’en montrant aux yeux du monde que nos droits sont respectés, les gens ne sauront pas ce qu’il se passe réellement ici. Comment en pleine procédure on te donne un billet retour pour retourner chez toi. Pas la moindre liberté. On est contrôlés avant de manger, avant de dormir, au réveil, constamment contrôlés.En vérité, s’ils faisaient tout pour nous aider personne n’aurait envie de fuir parce que nous nous sentirions en sécurité. Mais on stresse toujours, à tout moment. Chaque heure, chaque seconde, chaque minute. À tout moment ils peuvent nous faire retourner. S’ils ne veulent pas de nous, qu’ils nous envoient vers d’autres pays tels que la France, l’Italie, etc… pour qu’on fasse nos recherches.
Pardonnez-moi pour les fautes d’orthographe, je n’ai pas fait de longues études mais s’il vous plaît n’ignorez pas ce témoignage. On a réellement besoin d’aide. Je vous remercie.
Anonyme.