Je leur ai dit que je n’avais pas de papiers

Dame guinéenne arrêtée le 15/04 , sans doute en vue du vol collectif vers la Guinée et le Sénégal. Elle a été libérée le 25/04 suite à un recours urgent introduit par son avocat.

Son témoignage :

je leur ai dit que j’avais pas de papiers

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– Vous êtes au centre fermé de Bruges. Vous pouvez nous raconter ce qui s’est passé? Comment vous avez été arrêtée?

– On m’a arrêtée, j’étais sortie accompagner une amie le dimanche à 11h. On m’a arrêtée et on m’a demandé mes papiers. Je leur ai dit que je n’avais pas de papiers, que j’étais dans la procédure, et ils ne m’ont pas crue. Ils m’ont prise et on m’a envoyée dans une prison. C’est une prison. C’est grave quoi.

– Et qu’est-ce qu’il s’y passe? C’est vraiment une prison?

– C’est vraiment une prison. On m’a enfermée là-bas. Il n’y avait rien. Même pas de papier toilette. Il n’y avait rien. On m’a enfermée comme une criminelle, comme si j’avais tué quelqu’un.
Même de l’eau. De 11h jusqu’à 7h du matin le lundi, même de l’eau on ne m’a pas donné. Je n’ai rien mangé. J’ai vomi, je suis tombée. Je leur ai dit de me donner des médicaments. Ils m’ont dit qu’il n’y avait pas de médicaments mais que là où ils allaient me transférer j’aurai tout. Je leur ai dit qu’en attendant je devais prendre des médicaments, que j’allais mourir, que j’avais besoin de médicaments mais ils m’ont dit qu’ils s’en foutaient, que ce n’était pas leur problème.

Je suis restée là jusqu’au lundi matin. Ils sont venus me prendre et m’ont dit qu’ils allaient m’emmener dans un centre à Bruges. Mais qu’est-ce que j’ai fait pour qu’ils m’envoient dans un centre fermé? Ils m’ont dit que ce n’était pas leur problème. Ils m’ont menottée. Je n’ai rien fait de mal, vous me menottez pourquoi? On dit c’est comme ça qu’ils font ici.

Mais c’est pas possible, je ne suis pas une criminelle. Seulement à cause des papiers vous me menottez comme ça? Ils m’ont dit que c’est comme ça ici. J’ai dit ok. Ils m’ont menottée, j’ai pleuré de là-bas jusqu’à Bruges. Ils ne m’ont même pas regardée.
Arrivée à Bruges ici, on m’a demandé si je m’étais lavée. J’ai dit je n’ai pas mangé, je ne me suis pas lavée, rien. Je suis comme ça depuis hier.
On m’a dit de rester ici jusqu’à ce qu’ils vont regarder mon cas. J’ai dit mais mon cas il est comment? Appelez mon avocat pour voir mon cas. Moi je connais mon cas, mon avocat, tout le monde. Ils m’ont dit non, il faut que je reste ici.

Donc j’étais là, c’est pour ça que je suis là depuis lundi.

Hier l’assistante qui est là m’appelle et elle me dit : préparez-vous le lundi vous devrez partir à votre ambassade. Je lui dis qu’est-ce que je dois aller faire là-bas? Elle me dit qu’ il faut faire une interview. Après j’ai appelé mon avocat, il m’a dit de rester tranquille, qu’il était en train de voir mes dossiers, de faire ce qu’il a à faire.

– Et vous êtes malade aussi? Vous avez fait une demande 9ter qui a été négative.

– Oui ils ont refusé.  Le médecin qui est là-bas a écrit des choses, en disant que la maladie que j’ai c’est les travailleurs de la caisse nationale de l’agriculture de Guinée seulement, c’est seulement eux qu’on prend en charge.

Mais moi je ne sais même pas où se situe la caisse nationale de l’agriculture de la Guinée. Comment je vais faire si je rentre? Je ne travaille même pas là-bas. On me dit que c’est seulement si tu y travailles qu’on te prend en charge.

Je ne travaille même pas, je ne suis même pas allée à l’école, tout ce que je connais c’est ici que je l’ai appris. Depuis que je suis là je ne fais que des formations. Même ici on m’interdit de travailer. Comment je peux aller travailler dans la caisse nationale de l’agriculture de la Guinée?
Donc c’est comme ça on m’a refusé le 9ter…

Mon avocat m’ a dit que je ne pouvais pas rentrer en Guinée, je suis malade!
Même mon médecin a écrit que je ne pouvais pas bouger, je suis malade, je ne peux pas rentrer!

C’est ici que j’ai découvert la maladie. Quand je venais d’arriver et que j’ai demandé l’asile j’ai tout dit, on m’a violée, tout ce qu’on m’a fait en Guinée, c’est à cause de ça que j’ai eu cette maladie.
Ils ne veulent pas me comprendre.

Maintenant ils me disent d’aller à l’ambassade lundi pour qu’on m’explique. Comment je vais faire?

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