Témoignage en arabe d’un homme enfermé depuis plusieurs mois dans différents centres fermés en Belgique
08/08/2015
Question : Comment ça va ?
Réponse : Comment ça peut aller ,,,ça va pas du tout.
Q : Tu t’es fait arrêter où ?
R : Je vendais des cigarettes au marché des abattoirs. J’ai passé une nuit au commissariat et le lendemain on m’a enfermé à Bruges.
Q : On t’a enfermé seul?
R : Quand je suis arrivé au centre fermé, je me suis retrouvé dans une aile avec 30 personnes.
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Q : Comment tu vis l’enfermement?
R : Les agents font semblant de bien nous traiter, mais ça se voit que derrière leurs sourires ils nous détèstent. À titre d’exemple, ce matin nous avons du fromage périmé depuis 3 jours. Si tu réclames, tu finis à l’isolement au cachot. On te prive du tél à 22h, tout est réglé comme une prison. Une routine. On dort à 30 dans la même pièce. C’est comme les prisons dans nos pays d’origine.
Le matin on reçoit le petit déj,après on va une heure dans une petite cour. Après on doit retourner dans une salle où il n’y a même pas assez de place pour tous. Certains doivent rester debout. Pour la douche, c’est seulement si tu fais du fitness. Si tu ne vas pas à la salle de fitness tu n’as pas le droit à la douche. Une fois par jour.
Q : Tu peux nous raconter comment tu es arrivé en Europe?
R : Je suis arrivé en Italie en 2005, j’ai travaillé au noir dans l’agriculture, je me suis fait arnaquer par des gens qui m’ont demandé de l’argent pour avoir un titre de séjour.
J’ai eu un problème de drogue après. J’ai été arrêté une fois et même si la police n’avait rien trouvé sur moi à part 3 GSM j’ai été condamné à la prison, 5 ans en tout.
Q : Tu es resté combien de temps en prison ?
R : 4 ans et 4 mois.
Q : et après ?
R : J’étais perdu pendant 1 an, avant de venir chez des amis ici à Bruxelles.
Q : Et pour survivre tu vendais des cigarettes.
R : Oui et je ne suis pasle seul; j’ai trouvé déjà d’autres qui faisaient cela. Je pensais que c’était pas aussi grave.
Q : il y a d’autres personnes qui vendaient aussi des cigarettes quand tu t’es fait arrêter?
R : 7 ou 8, mais les autres ont tous été relâchés tout de suite car ils ont des papiers. La police s’est acharnée contre moi car une fois j’ai eu un conflit avec un policier, et j’ai été battu et j’ai fini aux urgences.
Q : Comment ça s’est passé au commissariat ?
R : Je n’ai même pas envie de parler de la police, j’étais intimidé, à chaque fois que tu dis quelque chose tu peux subir leur violence. Je suis en colère contre eux.
Il faut nous trouver une solution pour sortir d’ici. On n’en peut plus ici, on n’accepte pas cela mais la plupart se résignent. Et on est plusieurs nationalités différentes donc on ne peut pas bien communiquer entre nous pour s’organiser.
Moi je n’ai rien fait de mal ici en Belgique, l’avocat qu’on m’a désigné dit que c’est mon passé en Italie qui joue contre moi.
Q : Vous voulez rajouter quelque chose? :
Le quotidien c’est lourd, tu ne peux pas te reposer, il y a beaucoup de tension à cause du stress et de la fatigue.