18/04/2020
Nous recevons régulièrement des appels ou messages de plus en plus désespérés des personnes encore détenues au centre fermé de Vottem (CIV).
« Nous sommes les oubliés du royaume de Belgique, help me »
Ils sont encore une trentaine, qui ne comprennent pas pourquoi eux doivent rester emprisonnés, alors qu’environ 80 personnes ont été libérées.
Les requêtes de mise en liberté faites par leurs avocats, qui ont fait un gros travail, en commun, sur base de la pandémie du coronavirus et de l’impossibilité actuelle de les renvoyer dans leur pays d’origine (ou un autre), donnent des résultats mitigés : lorsque le juge ordonne la mise en liberté, souvent l’office des étrangers fait appel ; cela prend plusieurs semaines. Et le temps est long quand on est enfermé.
Ils sont tous évidemment très inquiets pour leur santé : face à l’épidémie de coronavirus ils nous témoignent du fait que la distanciation sociale n’est pas respectée, et il est rare de voir un agent de sécurité avec un masque. Si chaque détenu a du gel douche, souvent en quantité insuffisante, ils n’ont pas de savon pour se laver les mains, sauf s’ils l’achètent eux-mêmes au « magasin » du centre.
Suite aux nombreuses remarques d’un détenu à l’attention du personnel sur le manque de protection individuelle, et le non-respect de la distanciation sociale, on lui a d’abord dit que ça allait être discuté en réunion, puis il a été isolé (préau et accès internet réduits, et seul) dans une cellule « répugnante ». Il n’a plus aucun contact avec ses codétenus si ce n’est par téléphone. La raison qu’on lui a donnée, après qu’il l’ait réclamée à plusieurs reprises : « Vous risquez de provoquer une émeute en revendiquant de meilleures mesures sanitaires ».
Lorsqu’ils recevaient des visites familiales ou d’amis, ils pouvaient encore recevoir du tabac ou un peu d’argent pour se payer des cigarettes et des gaufres aux distributeurs, mais depuis l’interdiction des visites, ils sont encore plus démunis. Le CRACPE a apporté un petit soutien, tout comme nous avons continué à envoyer des recharges téléphoniques par sms grâce au gsm d’urgence que nous avons mis en place depuis le confinement, qui nous permet aussi une communication permanente avec les détenus.
Beaucoup d’entre eux ont de la famille en Belgique, parfois même femme et enfants, ne pas les voir ajoute encore une difficulté psychologique à leur enfermement. D’autres ont leurs familles bien loin , ou dans un autre pays d’Europe ; le monde entier est touché par le covid19. Ils craignent non seulement pour leur santé , mais pour celle de leurs proches.
Nous apprenons que le personnel du centre a mené des arrêts de travail : ils réclament notamment une prime de risque. Pour nous, il est certain qu’une promiscuité avec si peu de moyens de protection augmente le risque de propagation du virus, aussi bien pour le personnel que pour les détenus.
Pour cette raison et parce que la fonction même des centres fermés, selon la loi, mettre en œuvre des mesures d’expulsion, est devenue sans objet, étant donné la situation actuelle, nous réclamons la libération immédiate de toutes les détenues et de tous les détenus dans l’ensemble des centres fermés en Belgique.
Bien sûr, nous gardons toujours nos revendications fondamentales : la suppression des centres fermés et l’arrêt des expulsions, ainsi que la revendication de la régularisation des sans-papiers. A l’heure où l’agriculture manque de travailleurs, mais aussi les maisons de repos pour personnes âgées, les hôpitaux… tous les sans-papiers que nous connaissons sont prêts à mettre leurs compétences au service de la collectivité !
Source:CRACPE: https://www.facebook.com/pg/collectifderesistanceauxcentrespouretrangers/posts/?ref=page_internal
Appel d’une avocate
L’Office des Etrangers s’acharne.
Même après la divulgation d’images odieuses sur les conditions de détention au centre fermé de Merksplas, l’Office des Etrangers s’acharne dans certains dossiers pour maintenir des étrangers en détention.
Alors que les tribunaux libèrent sur base de l’illégalité des détentions, l’Office des Etrangers va en appel, ce qui allonge la détention d’au moins deux semaines et contraint les cours d’appel et les avocats à se réunir pendant le confinement.
Les détentions sont clairement illégales puisqu’en théorie, elles ne doivent servir qu’à expulser et que les expulsions sont actuellement impossibles.
Les détentions sont surtout criminelles puisqu’elles continuent en période de confinement et dans des conditions de promiscuité et d’insalubrité indignes d’un pays comme la Belgique. Les conditions dans les cinq centres fermés de Belgique sont innommables et cela doit cesser.
Nous exigeons encore une fois la libération de tous les détenus des centres fermés.