Audio : On m’a mis un fil du cou jusqu’aux mains (FR)

13 décembre 2011 – Témoignage d’une jeune femme congolaise de 18 ans, du centre fermé 127bis.

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Aujourd’hui on vous a dit que vous deviez vous préparer pour partir ?

Oui.

 Vous venez de quel pays?

Congo. J’ai dix-huit ans. J’ai des problèmes là-bas, au pays. Ma mère elle se trouve ici. J’avais déjà introduit une demande par une organisation à l’ambassade. Ma mère elle est légale ici, elle a des papiers belges. Si je suis venue avec des faux documents c’est pas par exprès ou bien pour venir en Belgique,c’est quand un général me poursuivait et qui voulait que je sois sa troisième femme.

Vous êtes la troisième femme d’un général?

Oui, il voulait que je sois sa troisième femme, mais il a 68 ans. J’ai refusé. J’ai pas pu supporter le choc.

Parce que vous ne vouliez pas l’épouser?

Oui, je ne voulais pas, je ne voulais pas. Il a 68 ans. Moi j’ai 18 ans, j’ai plein d’avenir devant moi, plein!

Vous avez donc pris l’avion pour échapper au général?

Oui c’est ça. … jusqu’à la maison là-bas chez ma grand-mère. Je ne sais pas quoi faire, je ne sais pas où me mettre, je ne sais pas où me garder. La meilleure solution c’est que dès que j’arrive à l’ambassade de la Belgique, je fais une demande d’asile. Je suis arrivée ici le 11 août. On m’a emmenée directement au centre.

Et votre mère elle a pu venir vous voir au centre fermé ?

Oui, ma mère vient toujours. Elle vient aux rendez-vous.

Et ils vous ont refusé l’asile ?

Oui. Ils ont refusé l’asile.

Et ça fait combien de temps que vous êtes au centre ?

Ça fait quatre mois … je refuse qu’on me rapatrie.

Combien de fois ont-ils essayé de vous expulser ?

Ca fait trois fois. La troisième fois, c’était le 21 novembre.

Et maintenant ils ont prévu de vous expulser encore une fois ?

Oui, aujourd’hui pour la quatrième fois.

Aujourd’hui à quelle heure ?

À 19h … c’est toujours comme ça.

Et vous allez résister ?

Ben, je ne sais plus quoi faire. Et s’ils veulent m’expulser, qui va venir me chercher à l’aéroport ?

C’était difficile pendant les expulsions ? Comment ça c’est passé ?

C’est vraiment difficile, on me menotte, on me met des fils et des menottes et tout, même il y a un fil au cou.

On vous a mis un fil au cou, non, autour des mains ?

Oui au cou, au cou jusqu’aux mains.

Qui part du cou jusqu’aux mains ?

Oui au cou jusqu’aux mains, voilà. Et des menottes, je ne peux pas bouger. J’ai crié.

C’est dur la façon dont ils vous parlent ? Comment ça ce passe ?

C’est pas facile, c’est dur, c’est pas facile.

Et là ils ont dit aussi que ça allait être par la force qu’ils allaient vous renvoyer ?

Oui. La deuxième fois c’était par force, j’avais lutté. La troisième fois j’ai lutté. Et aujourd’hui c’est la quatrième fois. J’en sais rien pour le moment en fait.

Et comment ça se passe dans le centre ?

C’est pas vraiment bien.

Il y a d’autres Congolais avec vous, non?

Oui, il y a d’autres Congolais.

Et l’assistante sociale, que-ce qu’elle vous conseille en fait ?

Eux ils sont là pour me décourager, ils sont là pour dire de rentrer. Hier je ne me sentais pas bien, quand j’ai demandé des médicaments, ils ont refusé. Aujourd’hui le docteur qui dit, je dois y aller. C’est une manière pour m’expulser, pour m’enfermer là-bas et pour aller directement à l’aéroport. Je comprends tous ces jeux, j’ai dit que je ne pars pas.

On m’a raconté que des passagers et le commandant de l’avion avaient refusé de vous prendre à bord ?

Oui, ils ont refusé.

Qui ? Les passagers ou le commandant ?

Les hôtesses en fait.

Pourquoi ? Parce qu’il y avait trop de violence ?

Non, parce que j’avais mis du caca…

C’est un bon moyen.

Oui, c’est parce que j’avais mis ça et tout…

D’accord, et donc ils ont dit dans ces conditions ça ne va pas vous devez la reprendre ?

Oui, c’est ça.

Et ils ont été violents avec vous ?

La deuxième fois ils m’avaient frappée, mais la troisième fois ils n’ont pas frappé.

Que-ce qu’ils vous ont fait la deuxième fois ?

Une assistante sociale, la deuxième fois l’autre m’avait giflée.

Une policière ou une assistante sociale ?

Oui, une policière, et un monsieur qui m’avait frappé sur la tête.

Ben bon courage. En tout cas il y a des gens qui essayent de faire quelque chose pour vous et qui font passer l’information.

Suite à une dernière tentative d’expulsion, cette jeune femme a été libérée avec un ordre de quitter le territoire. Si elle n’avait pas résisté à toutes ces menaces, elle serait aujourd’hui au Congo.

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