“Je préfère mourir ici”

01/013/2017

À l’extérieur, de grandes barrières, des grilles à perte de vue, des parlophones tous les 3 mètres, des fenêtres cadenassées par des vis. A l’intérieur, des innocents nés avec les mauvais papiers ou dans le mauvais pays. L’entrée au centre fermé a de quoi en rebuter plus d’un. Vision idyllique d’un Etat qui entend faire de sa politique migratoire une politique répressive, inhumaine, conditionnée par la peur. Ses détenus appellent ça « la prison douce » ou le « Guantanamo avancé », c’est selon. Mais c’est bien de conditions carcérales dont il s’agit : “Ici on est enfermé dans la chambre de 23h à 7h, on ne peut pas toucher les vitres sinon l’alarme se déclenche, on n’a pas d’interrupteur; c’est eux qui décident quand on éteint les lumières, c’est dur”.

Alors que les politiques migratoires sont de plus autoritaires et exclusives, au centre, les tickets de départ se multiplient, les aller-retour vers l’aéroport n’en finissent pas, c’est la valse aux expulsions. S’ils ont tous pour socle commun les barrières du centre fermé, les détenus ont chacun une histoire singulière : des persécutions politiques au mariage forcé en passant par l’homosexualité, les histoires sont nombreuses.

B., lui, a été arrêté à Zaventem. Il n’avait pourtant pas vraiment envie de poser ses bagages en Belgique. Originaire du Togo, il était en transit à Zaventem pour échapper aux persécutions qui lui sont infligées dans son pays. Son crime ? Son orientation sexuelle. B. est homosexuel. Au Togo il risque 3 ans de prison « Pour les autorités de mon pays, c’est un esprit maléfique qui anime une personne et pour s’en débarrasser, il faut le bastonner ou l’emprisonner ». Ce n’est pas en prison que B. a été envoyé au Togo mais dans un camp militaire pendant 3 mois; 3 mois d’enfermement et de torture.

En Belgique, c’est donc une protection qu’il est venu demander. Comme réponse, il a déjà reçu son premier ticket d’expulsion, le CGRA ne croit pas en son homosexualité : « Le Commissariat général souligne que vous n’avez pas été dans la mesure de le convaincre » ont-il lancé dans la procédure de recours. Si on inversait l’exercice, comment feriez-vous pour prouver votre hétérosexualité ? Alors que les clichés de genre sont encore profondément ancrés dans toutes les sphères de la société belge, l’exercice s’avère périlleux voire même dangereux. Aujourd’hui, il est détenu depuis 3 mois dans le centre, période d’attente, de stress et d’anxiété qui l’affecte particulièrement.

“Je préfère mourir en prison en Belgique que devoir repartir au Togo”
“S’ils me rapatrient au Togo c’est comme s’ils amenaient un animal à l’abattoir”

Qu’il soit homosexuel ou non, ce n’est pas tant la véracité de ses propos qui est à remettre en cause, mais bien l’existence même d’une structure étatique qui enferme, menotte et bâillonne hommes, femmes et même enfants pour le simple fait d’avoir cru que l’Europe c’était les « droits de l’homme ».

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