Témoignage audio à Bruges: “Notre sort est dans vos mains” 08/04/2020
Tanscription du témoignage:
“Je suis au centre fermé de Bruges depuis le 30 mars 2020. Je suis venu ici, depuis le jour que je suis venu ici je n’arrive pas à acheter du shampooing, je n’arrive pas à acheter du gel douche.
Les chefs, les gardiens et les détenus n’ont pas de masques et ne respectent pas les mesures du corona. Il n’y a pas 1,5 mètre, on vit tous dans un groupe. Il y a une salle pour fumer et de temps en temps, on est à vingt ou vingt cinq personnes dans une salle de 6 mètres. Dans le préau, les gardiens n’ont pas de masques, ils n’ont pas de gants et ne respectent pas [non plus] les mesures. Ils restent ensemble. Dans les deux autres salles de télévision et salle de billard aussi c’est la même [chose], ils sont deux, les gens vont à droite ou à gauche ou dans les salles une, deux ou trois. Dans le préau il n’y a pas de respect du corona et dans les deux salles non plus.
Pour le reste, si tu vas chez le docteur (et tu dis,) et tu appelles et tu vas là-bas, tu vas attendre mais à la fin il fait rien pour nous. Il nous traite comme des animaux. Ici le mètre et demi et les mesures du corona, il n’y en a pas du tout, il n’y a aucune personne qui respecte ça. Pour les chefs quand ils viennent le matin, ils mesurent, et seulement à eux, s’ils ont plus que 37°, ils ne rentrent pas. Mais le corona, tout le monde le sait, tu peux avoir comme on dit en néerlandais “koorts”, la fièvre, après une semaine ou dix jours.
Si une personne malade vient ici, tout le monde va être malade. On va tous être malade parce qu’on a tous des contacts les uns avec autres, on se [serre] la main, tout le monde reste l’un à côté de l’autre, on fume même des cigarettes ensemble. On doit allumer les cigarettes avec le briquet du chef, de leurs mains aux notres. Il n’y a vraiment vraiment pas de respect du coronavirus. Pour le reste, dans la salle à manger aussi, nous, tous les groupes – il y a deux groupes: A-B et C-D – le groupe des A-B, on descend ensemble en groupe. Moi je suis B11. On descend dans la salle, on mange ensemble. Il y a une vingtaine de détenus et une dizaine de chefs. Il y a aussi deux personnes qui travaillent dans le restaurant, qui donnent à manger, et on est tous dans la même salle et il n’y en a pas un, même pas un ni des détenus ni des chefs qui respecte les mesures du mètre et demi.
J’espère que vous pouvez nous donner [un coup] de main, cette situation est vraiment inhumaine. Moi je suis malade, j’ai 42 % de capacité des poumons, j’ai eu la tuberculose avant. Depuis que je suis ici, les gens passent et ils nous laissent dans une situation inhumaine. ça fait une semaine que je ne me lave pas, je me lave avec de l’eau, avec l’eau et le savon. Ils ont du savon qui vraiment te coupe la main, c’est un savon qui vraiment vraiment vraiment, je sais pas avec quoi il est fait mais il te coupe les mains. Et dans les douches, on doit se laver à l’eau, il n’y a ni gel douche, ni shampooing.
Merci pour votre information et on espère que vous allez nous donner un [coup] de main. Moi je suis le père d’enfants belges. Il y a beaucoup de gens qui sont ici, qui ont des enfants, qui ont des adresses. Vous pouvez regarder après nous parce que nous sommes aussi des êtres humains, même si on est des étrangers, nous sommes aussi des êtres humains.
Merci beaucoup et au revoir. Notre sort est entre vos mains madame. On n’a pas peur de faire des grèves et d’aller au cachot mais on a peur d’être malades du corona, qu’on puisse mourir et que notre famille soit loin de nous, qu’on ne sait même pas retourner dans notre pays d’origine quand on sera mort, ils vont nous mettre dans un sac plastique et nous jeter, ici, en Belgique.”